aimer le XXIème siècle
AIMER (quand même) le XXI siècle. Jena Louis SERVAN-SCHREIBER. Ed. Albin Michel. 139 p
Préface d’Edgar Morin.
En ce XXI siècle, nous sommes débordés, souvent inquiets, fascinés par le numérique, nomades dans notre carrière et notre vie amoureuse, incapables de se projeter dans l’avenir, ballottés entre ce qui menace et ce qui promet, plus seuls qu’avant, et toujours scotchés à notre écran.
Et, si nous vivions une nouvelle « renaissance » qui fut une époque tourmentée, pleine de doutes, mais riche de créations et de nouvelles libertés ?
Trouver du sens dans ce tourbillon, retrouver du temps au milieu des urgences est peut-être à notre portée, si l’on redécouvre une philosophie de vie laïque au joli nom de sagesse.
On peut trouver des raisons d’aimer, quand même, le XXI siècle.
Quelques bribes de phrases, de paragraphes d’un livre qui peut nous faire réfléchir sur ce que nous sommes dans ce monde du XXI siècle.
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, aussi ils l’ont fait » Marc Twain
« Sans l’espérance, on ne trouvera pas l’inespéré » Héraclite
« Avoir une conception du monde, c’est se former une image du monde et de soi-même, savoir ce qu’est le monde, savoir ce que l’on est…. Toute conception du monde a une singulière tendance à se considérer comme la vérité dernière sur l’univers, alors qu’elle n’est qu’un nom que nous donnons aux choses »…
Le temps que nous pouvions consacrer à chaque activité ou loisir, s’est réduit pour faire la place à d’autres. D’où un stress grandissant et, pire encore, de moins en moins de recul pour prévoir, comprendre, peser les conséquences de ce que nous entreprenons…
Chaque nouvelle dans une même journée nous est serinée des dizaines de fois. Quel sens peut produire ce formidable dispositif technologique voué au bégaiement inlassable…
Pourtant il n’y a, en soi, rien de mal à vivre au présent. Les sagesses asiatiques considèrent depuis des millénaires que seul existe l’instant, celui dont nous sommes conscients maintenant. Passer à coté de ce maintenant par distraction ou surcharge, ce n’est pas l’avoir pleinement vécu. Ce qui nous stresse aujourd’hui, c’est que, du fait de cette surcharge, nous ne jouissons pas vraiment de chaque instant…
Très vite, dans la seconde moitié du XXe siècle, la consommation est passée d’une simple nécessité à un comportement, une culture, bientôt une compulsion. Ne constate -t- on pas , selon le CREDOC, qu’entre le quart et la moitié des achats ne sont pas prévus avant l’entrée en magasin ?..
Désormais, le virtuel fait partie de notre vraie vie et l’enrichit notablement (nous pouvons tout savoir, tout voir à travers un écran d’ordinateur). A nous de ne pas oublier d’aller de temps en temps nous coucher dans l’herbe pour écouter le vent.
Pour pouvoir aimer ce siècle, il faut y trouver un sens et être capable de la considérer avec sagesse. Cela demande de la réflexion, mais ce devrait être dans nos moyens.
A l’orée des années 80, une fois le confort largement répandu, la demande de produits industriels s’est ralentie, la croissance aussi. Pour trouver du profit, il a fallu se tourner vers les jeux financiers, acquisitions, fusions, spéculations en tous genres. Les plus doués ont su en tirer parti pour s’enrichir encore plus vite…
Tant que les églises fournissaient une réponse obligatoire, celle de la foi et des textes sacrés, s’interroger sur le sens de la vie était impie. Depuis la sécularisation croissante du monde, peu nombreux sont ceux qui le trouvent encore dans la foi. Chacun sent qu’il doit se procurer sa propre réponse ou, s’il n’y parvient pas, noyer la question dans la consommation et le divertissement...
En revanche, la question du sens dans notre vie se pose à l’occasion de chacun de nos choix, de nos actes…
La vie même, par sa force, sa singularité, ses péripéties heureuses ou dramatiques, n’est-elle pas porteuse de son propre sens. Ainsi, la plupart de nos contemporains vivent sans trop se poser de questions sur leur destinée, tant qu’ils ne sont pas confrontés aux crises et aux tragédies. Camus ne décrivait il pas l’absurde comme le monde vidé de son sens sans que soit effacé le tragique de l’existence
Au quotidien, l’importance du sens est du même ordre que celui du sel dans les aliments : sans lui, tout semble fade, peu appétissant. Une action dépourvue de sens, une attente imprévue, une conversation insipide, un mauvais spectacle dont on ne peut s’éclipser, sont subis comme un vide dérisoire, ou comme une puissante source d’ennui » ? Et n’avons-nous pas horreur de l’ennui ? Le sens dont nous ne pouvons pas nous passer est d’ailleurs à comprendre aux deux sens du mot : direction et signification. Il pointe vers où nous croyons et voulons aller, il indique si ce qui se présente à nous en vaut la peine. Il nous rattache à la vision de l’existence que nous nous sommes bricolée, puisqu’il n’y a plus d’ « officielle ». Spontanément, nous tentons de donner de la valeur à n’importe lequel de nos actes, ordinaire ou exceptionnel, afin qu’il soit en cohérence avec nos idées et avec ce qui importe vraiment à nos yeux.
Une enquête récente (2012) du Trend Observer d’IPSOS vient de le confirmer : jamais la « demande d’humain » n’a été aussi forte dans les sociétés développées, en Europe, aux Etats unis, au Japon. Réaction palpable dans la dématérialisation des rapports que génèrent les relations en réseau. Une forte demande s’exprime donc de rencontres physiques, d’émotions, de stabilité et de continuité relationnelle, de civilité et de politesse, de confiance et de sécurité. Comme si, collectivement, nous demandions à trouver un havre après avoir parcouru le monde à la vitesse de la lumière…
Pour faire une hypothèse, optimiste ou pessimiste sur notre époque, il faut lever la tête du guidon sur lequel nous vivons courbés, obsédés par nos problèmes à court terme et sans vision d’ensemble de l’évolution de l’humanité qui nous a précédés et qui nous succédera. Si l’on veut bien changer de lunettes, il apparaît que le progrès les plus décisifs au cours des âges, sont toujours non pas ceux des conditions matérielles de vie, mais ceux des mentalités et des valeurs………………………………………….
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